Clio et Calliope
La culture en un clic

. . . . .





























































































Débarquement et bataille de Normandie, la préparation

Les alliés ont encore en tête la désastreuse tentative de débarquement en août 1942 à Dieppe ou 3000 soldats sont morts sur les 6000 qui ont débarqué. Le manque de préparation et l'importance de la résistance allemande avaient brisé un assaut qui n'avait pas dépassé les plages.

Forts de cette expérience et de celles des débarquements d'Afrique du Nord (1942) ou de Sicile (1943) qui démontraient l'impossibilité de prendre un port de front top bien protégé, les alliés élaborent les phases du débarquement en France prévu initialement le 1er mai 1944. Plusieurs réunions préparatoires établissent peu à peu un plan d'action. Est pris en compte la confrontation des différentes stratégies d'attaques : alors que les Américains préfèrent une attaque de front en France, les Britanniques sont partisans d'une stratégie de périphérie visant à affaiblir le Reich avant de l'attaquer de front : attaques au Maroc, en Sicile, en Norvège, etc. Après une première réunion à Québec en 1942, une seconde a lieu en janvier 1943, à Casablanca où est prise la décision d'attaquer l'Europe de l'ouest. Cette décision répond aux demandes de Staline qui souhaite ce débarquement pour réussir sa contre offensive débutée après la bataille de Stalingrad achevée en janvier 1943. A Téhéran, en novembre de la même année, Staline participe à une nouvelle réunion qui précise le déroulement des opérations.

L'industrie alliée accélère alors sa production pour être en mesure de livrer les véhicules, navires et infrastructures diverses (les fameux ports artificiels notamment) qui formeront le plus grand rassemblement militaire de l'histoire. Pour que le débarquement réussisse, il faut trois conditions essentielles, une nuit de pleine lune, une marée basse ou semi-basse et une météo clémente. Le 4 juin, Eisenhower, commandant en chef des forces alliés, retarde pour 24 heures les opérations car la météo est catastrophique. Les prévisions annoncent une amélioration pour la nuit du 5 au 6 juin, il n'y aura pas d'autre possibilité avant plusieurs semaines. Eisenhower tranche, ce sera le 6 juin.

Des missions de reconnaissance et les informations transmises par la résistance française permettent d'orienter le choix sur la Normandie et d'adapter l'attaque par rapport aux défenses allemandes. Les alliés disposent d'ailleurs d'un plan particulièrement précis de ces installations allant jusqu'aux prénoms des officiers responsables de tel ou tel bunker. La décision est prise de débarquer à mi-marée, ce qui permet d'apercevoir les obstacles métalliques et bétonnés des plages et ainsi de les éviter. Une partie du mur de l'Atlantique sera donc inefficace. Par ailleurs, la construction d'engins spécialisés permettra de réduire les différents obstacles : le " char fléau " fait exploser les mines (photo ci-jointe) par un système de rotation de chaînes qui viennent frapper violemment le sol tandis que le " char bobine " déroule un tapis sur le sable pour garantir aux véhicules lourds qui suivront de ne pas s'enliser dans le sable,. etc..). Le plan de débarquement nommé Overlord " seigneur suprême " prévoyait de débarquer au Jour J 50 000 hommes, 15000 chars et 2500 véhicules tout terrain de quoi établir une tête de pont durable. Dix jours après, 18 divisions devaient être débarquées pour élargir la tête de pont.

L'accumulation des hommes et du matériel depuis des mois faisait de la Grande-Bretagne le plus gigantesque camp d'entraînement du monde, surtout au sud de Plymouth à Newhaven, ou plus de 4000 navires et chalands attendaient d'acheminer l'extraordinaire réserve militaire. Des entraînement minutieux grandeur nature sont organisés : les soldats simulent le débarquement sur les plages anglaises, les parachutistes travaillent leur atterrissage et les blindés manœuvrent.

Un point de ralliement en mer appelé Piccadilly Circus est fixé, les couloirs maritimes pour le rejoindre sont tracés par des dragueurs de mines. L'opération maritime, nommée " Neptune ", se divise en trois grandes missions : une partie de la Royal Navy a pour mission de surveiller les flancs de l'armada pour empêcher une potentielle pénétration des U-boot. D'autres navires, les fameux Liberty ship pour les hommes de troupes notamment, servent à acheminer les forces. Enfin les navires de combat doivent réduire à néant l'artillerie lourde des plages par un bombardement massif des côtes. Ne pouvant bénéficier de ports suffisamment importants pour un débarquement massif, Churchill imagina la construction de ports artificiels remorqués depuis l'Angleterre (port d'Arromanches ou de Vierville sur Mer). Pour l'acheminement du carburant, un projet d'envergure est imaginé par Churchill : il s'agit d'un oléoduc géant immergé depuis l'île de Wight. Appelée Pluto (Pipe Line Under The Ocean) ce nerf de la guerre long de 165 Km est un élément clé de la réussite de l'opération Overlord. Le projet est mené à terme malgré son ambition et les contraintes techniques qu'il génère. C'est, en quelque sorte, le premier " tunnel sous la Manche " !

Les Allemands ne disposaient que d'une force aérienne limitée, c'est une de leurs faiblesses. L'aérodrome de Caen ne suffit pas à obtenir la maîtrise du ciel face aux 7500 avions alliés qui vont déferler en Normandie pour détruire les chasseurs allemands et empêcher, par le bombardement massif des voies de communication et des installations de défenses, tout déplacement de troupes dans la France du Nord-ouest.

L'accumulation des forces et les bombardements auraient pourtant dû attirer l'attention de l'état major allemand qui savait pertinemment que le débarquement se préparait. Mais quand et surtout où ? La préparation alliée passe donc par une campagne de désinformation baptisée Fortitude : la construction de leurres gonflables à l'est du bassin de Londres pour faire croire à un débarquement dans le Pas de Calais (photo de gauche) ou le matraquage des villes du Nord de la France confirment cette tendance. Le bombardement des véritables objectifs en Normandie ne devrait commencer qu'à la veille du Jour J. Des camions de ravitaillement fourmillent dans le nord-est de Londres pour faire croire à un acheminement de matériels dans cette direction.

Plus subtil, un acteur sosie de Montgomery est envoyé à Casablanca et glisse à l'oreille d'un diplomate germanophone la forte possibilité d'un débarquement sur les côtes de la méditerranée. Jusqu'au jour même du débarquement, les alliés continuent à exploiter l'opération : un faux quartier général à l'est de Londres envoie des messages pour qu'ils soient interceptés. Par ailleurs, des agents doubles contribuent, par de faux messages, à désinformer les services de renseignements allemands. Des bombardements dans le Pas de Calais sont organisés la nuit du 5 juin. Même s'ils sont inutiles pour le débarquement, que des soldats vont mourir et que la population civile va subir l'attaque, le commandement allié pense que ce sacrifice est nécessaire pour continuer à faire croire aux Allemands que la Normandie n'est qu'une diversion.

L'opération Fortitude porte ses fruits, des oppositions entre Rommel et Von Rundstedt sur la marche à tenir empêchent une décision rapide (laisser débarquer les alliés pour lancer une contre-attaque massive ou , au contraire, les faire reprendre la mer aussitôt arrivés comme le suggérait Rommel, lequel a déclaré concernant le débarquement : " Notre seule chance est d'arrêter l'ennemi pendant qu'il est encore dans l'eau. Les vingt quatre premières heures seront décisives [...] Pour les alliés, comme pour nous, ce sera le jour le plus long ". ). Mais Hitler, après hésitation, pense que la Normandie n'est qu'une stratégie de diversion et que le véritable emplacement est le Pas de Calais, rares sont ceux qui finissent par croire en l'inverse, parmi eux, Rommel qui démontre encore ici son exceptionnel génie stratégique, il ne sera pas écouté.

Le soir du 4 puis du 5 juin différents messages sont adressés aux forces de résistances dont les fameux vers de Verlaine " Les sanglots longs des violons de l'automne... " puis la nuit suivante la suite "... blessent mon cœur d'une langueur monotone ". Chaque groupe de résistance concerné accomplit les missions qui lui sont propres : destruction des lignes de chemin de fer, poteaux de communication à faire exploser, dépôts de munition à attaquer, etc. L'opération Overlord est lancée.

Suite : Le Jour J