Le secret du débarquement est bien gardé. Peu savent pour quand il est prévu, De Gaulle n'est d'ailleurs informé de la date précise que deux jours avant. Les alliés considèrent De Gaulle et la France comme des acteurs d'importance moyenne et leurs objectifs pour le pays ne sont pas ceux du général. A plusieurs reprises, celui-ci s'oppose à Roosevelt ou au plan de Chruchill qui fait de la France un espace sous administration alliée. La ténacité du général contribuera à faire changer les plans initiaux, notamment sur le statut ci dessus précité.
A la veille du Jour J, quand sont distribués des billets français aux soldats, ils comprennent qu'ils sont à la veille du plus grand débarquement de l'histoire humaine. 173 000 hommes participent à cette opération soit huit divisions, la très grande majorité sont Anglais, Américains ou Canadiens. Quelques polonais et un seul commando français, le commando Kieffer fort de 177 hommes, s'ajoutent à cette force anglo-saxonne.
Dans la nuit du 5 au 6 juin, des parachutages massifs et le largage de centaines de planeurs avec près de 8000 hommes à leur bord forment la première vague d'assaut. Ces hommes ont pour mission de retarder les renforts allemands en s'emparant de positions stratégiques, parmi elles, la batterie de Merville ou les ponts de Ranville et Bénouville (le fameux Pégasus Bridge). Ces deux ponts sont stratégiques puisque qu'ils permettent le contrôle du passage de l'Orne au nord de Caen. Trois planeurs atterrissent près des ponts. En sortent les soldats de la 6e division aéroportée Britannique. Après une demi heure de combat, les ponts sont pris, ils doivent être tenu jusqu'à l'arrivée des renforts dans le courant de la journée du 6 juin, mais à ce moment rien n'est encore définitif, les alliés n'ont pas encore débarqué.
Le nord et l'est de Caen forment la première zone prévue aux parachutistes et planeurs. La seconde, couverte par les forces américaines (101e et 82e division aéroportée), est comprise sur la région entre Carentan et Sainte-Mère l'Eglise. De cette opération, chacun se rappelle l'anecdote de ce soldat américain, John Steele, qui, pour ne pas être abattu comme ses camarades, fait le mort, pendu sur le toit de l'Eglise du village de Sainte Mère l'Eglise avant d'être fait prisonnier et presque aussitôt libéré. Si la majeure partie des objectifs est atteint, des erreurs de parachutage font atterrir les alliés au bout du canon des allemands ou à parfois plus de 30 kilomètres de leur lieu prévu. Par ailleurs, sur les six régiments parachutés sur le Cotentin (soit 3000 hommes), seuls deux bénéficient de conditions d'atterrissage normales, les huit autres subissent entorses, noyages dans les marais ou s'écrasent au sol par manque d'altitude.
A côté des parachutages réels, les alliés organisent des simulacres d'invasions à l'Ouest de St-Lô cette même nuit vers 00h30 : ce sont les dummies. Il s'agit de faux parachutistes de taille réduite, qui, en arrivant au sol, pétardent et imitent le son des mitrailleuses. Plus qu'un gadget, les dummies sont une arme stratégique destinée à désorganiser la résistance et donner l'impression que le nombre de parachutistes global est plus important.
A l'aube, l'armada navale alliée forte de près de 7000 navires est visible des côtes. La seconde phase du débarquement va avoir lieu : le bombardement des batteries côtières. Il débute vers 6h00 du matin. Au matraquage intensif des cuirassés, destroyers ou croiseurs alliés s'ajoutent les 2700 bombardiers anglo-américains qui déversent des tonnes de bombes sur les défenses bétonnées allemandes. Un brouillard artificiel est créé pour gêner les tirs défensifs. Ensuite, les soldats s'exécutent. Descendant des navires pour embarquer sur les chalands, ils sont à quelques kilomètres des plages.
Cinq zones voient débarquer les forces anglo-saxonnes : Utah, Omaha pour les Américains Juno, Gold et Sword pour les Britanniques et Canadiens. Les Allemands sont surpris, persuadés que les alliés ne peuvent pas attaquer un jour de mauvais temps. Rommel est repartit en Allemagne et le général Marks, commandant des troupes de Basse-Normandie, fête son anniversaire à Saint-Lô.
A 6h30, les premiers soldats débarquement sur Omaha et Utah beach. Sur la seconde plage, et bien que le débarquement se déroule à 2km de l'endroit prévu suite à une erreur de navigation, le soutien de l'aviation et des blindés permet de s'emparer des lignes de défenses, les pertes sont inférieures à 50 hommes. Cependant, sur Omaha, les cibles de l'artillerie et des bombardiers n'ont pas été atteintes. Des centaines de vaches sont mortes à l'intérieur des terres, le tir était trop long. De plus, le hasard fait que les Allemands ont organisé un exercice anti-invasion à ce moment. Les défenses allemandes, flanquées sur la colline surplombant la plage, sont organisées sur Omaha en 14 ensembles (de WN60 à WN73) constituées de bunkers abritant canons, mitrailleuses, postes de commandement ou abris. Chacun des éléments d'un même ensemble sont reliés par des tranchés. Ce qu'il en reste aujourd'hui de ces défenses ne donne qu'une idée partielle de ces installations.
Omaha Beach deviendra l'emblème du débarquement. La plage est longue de 6 Km, de Colleville sur Mer à Vierville sur Mer. Les premières vagues d'assaut sont brisées par les mitrailleuses qui déciment les soldats. Bloqués dans l'eau, cachés derrière les pièces métalliques ou bétonnées placées par les Allemands sur la plage, les soldats américains mettent près d'une heure trente pour avancer de quelques mètres, 70% des effectifs sont perdus ou blessés (photo ci-jointe prise par Robert Capa, seul photographe présent sur la plage ce jour là). La mer est rouge de sang, les soldats trébuchent sur les corps immergés de leur camarades. Les blindés coulent dans la Manche, seuls quelques uns arrivent sur la plage. En début d'après-midi, le général Bradley qui dirige les opérations de ce secteur envisage de ré-embarquer. Il faut attendre la fin de l'après-midi et d'autres vagues pour que la situation soit maîtrisée. Symbole de ce massacre, le cimetière américain de Colleville sur Mer, qui surplombe la plage, abrite les tombes de près de 10 000 soldats morts pendant la libération de l'Europe. Inauguré en 1957, la France à légué a perpétuité cette terre au gouvernement Américain. D'autres cimetières en terre normandes rappellent la dureté des combats, notamment le cimetière allemand de la Cambe où plus de 21 000 morts reposent. Dans chacun de ces cimetières, le visiteur est frappé par la jeunesse des soldats, entre 18 et 25 ans pour la très grande majorité.
Sur les trois autres secteurs, Gold, Juno et Sword, les troupes Canadiennes et Britanniques bénéficient d'une situation plus positive, au milieu de l'après-midi, après de violents combats notamment dans le secteur de Juno, le contrôle des premières positions allemandes est effectif et les troupes rentrent dans les villages côtiers. L'usage abondant des engins de déminage facilite la progression de l'infanterie. Les premiers blindés permettent de dénicher les allemands des poches de résistance. C'est ainsi que sur Juno, les Sherman amphibies (entourés d'un flotteur et munis d'hélices), débarqués à 3 kilomètres des plages et qui arrivent pour certains aux portes des défenses Allemandes, se joignent aux sapeurs canadiens pour faire exploser les bunkers allemands. L'assaut allié est minutieusement préparé et la Wehrmacht est affaiblie par cinq ans de guerre qui ont neutralisé 4 millions d'hommes. Certains soldats de l'armée allemande, recrutés dans les pays de l'Est, n'ont pas autant d'ardeur et d'idéaux, ils se rendent plus facilement.
La pointe du Hoc, proche d'Omaha Beach, est une cible importante à conquérir. En haut de la falaise, les Allemands avaient installé une batterie côtière permettant de balayer une large zone, tant Utah qu'Omaha beach, notamment grâce à six obusiers de 155 mm de fabrication française. Le résultat incertain des bombardements nécessite l'envoi de compagnies. Débarqués sur une petite plage de galets, les 227 rangers du colonel Rudder escaladent la falaise sous les tirs allemands. Arrivés en haut, ils prennent un à un les bunkers et s'aperçoivent que les canons ont été déplacés. Pendant deux jours, les rangers doivent résister, sans renfort, aux attaques Allemandes. Aujourd'hui, le nombre impressionnant de trous et les dimensions de certains d'entre eux (5 mètres de profondeur sur 10 de long) donne l'impression qu'il s'agit d'un Verdun en miniature. La préservation du site rappelle l'intensité des combats et la puissance des bombardements.
A la fin de la journée, différents éléments d'armés assurent leur jonction pour former la base de la tête de pont. Au soir du 6 juin, environ 10 000 hommes sont morts, blessés ou prisonniers, 135 000 sont débarqués avec 900 chars. Le 8 juin, les alliées tiennent environ 70Km de côtes sur 8 à 16 Km de profondeur. Ce jour là Bayeux est libérée mais Caen ne l'est pas, c'est l'un des gros points noirs du bilan du débarquement. Les alliés vont piétiner longtemps devant la ville avant de l'arracher aux mains de la résistance allemande au prix de pertes importantes et de populations meurtries. Cependant l'armada peut débarquer les milliers de véhicules qu'elle transporte, la bataille de Normandie débute, et avec elle, la libération de la France. Une phrase d'un soldat allemand résume la situation au Jour J +2 : le "Mur de l'Atlantique" n'avait pas tenu ses promesses."